samedi 6 mars 2010

RDC: A la demande du Président Joseph Kabila - les Américains forment l'armée congolaise

Source: Le Palmarès

50 Américains vont former un nouveau bataillon de 800 à 1000 soldats congolais. Ils répondent ainsi à une demande du Président de la République Démocratique du Congo, Joseph Kabila Kabange. Demande faite il y a un an, lorsque les Etats-Unis avaient critiqué les crimes commis par certains éléments incontrôlés des Fardc à l’Est du pays.
Le général Richard Sherlock et l’ambassadeur Anthony Holmes étaient jeudi à Bruxelles pour y expliquer le projet américain de formation de militaires congolais, inauguré à Kisangani le 18 février dernier. Il s’agit d’un projet d’Africom, le commandement militaire américain pour l’Afrique, approuvé par le président George Bush en 2007. Il s’agissait d’en informer les Européens et, au passage, la presse. Africom, a indiqué l’ambassadeur Holmes, adjoint au commandant chargé des activités civiles et militaires, a été d’abord orienté vers la sécurité, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme islamique après les attentats de New York, le 11 septembre 2001 qui avaient été précédés, le 7 août 1998, par des attaques contre les ambassades américaines de Nairobi, au Kenya, et Dar es Salam, en Tanzanie, qui ont fait respectivement 213 et 11 morts, ainsi que 4500 et 85 blessés.

L’intérêt de Washington pour l’Afrique est aujourd’hui « bien plus important qu’auparavant ». Depuis 2003 Washington a ainsi développé un programme de lutte contre le terrorisme en Afrique sahélienne (Mali, Niger, Tchad, Sénégal, Maroc, Mauritanie, Nigeria, Algérie, Tunisie) en formant plusieurs centaines d’officiers tout en finançant des projets de développement.L’engagement d’Africom, précise Mi Holmes, est de construire des capacités en Afrique, pour que ces pays puissent contrôler eux-­mêmes leurs problèmes de sécurité. « Ce n’est pas une militarisation de la politique américaine » sur le continent, « mais un appui à celle-ci », a-t-il soutenu.S’agissant du Congo, Africom s’engage à construire des capacités en faveur de la paix. C’est à la demande du président Kabila que Washington prend en charge la formation d’un bataillon congolais, demande faite il y a un an, lorsque les Etats-Unis avaient critiqué les crimes commis par l’armée congolaise dans l’est du pays, en particulier l’abondance des viols dont elle se rend coupable.
L’insistance de la secrétaire d’Etat Hillary Clinton sur ce point a joué, note ainsi M. Holmes, selon qui la formation donnée par les Américains vise à renforcer le rôle des militaires dans la démocratie » leur « apprendre à protéger les droits de leur population des professionnaliser. Le général Sherlock a précisé pour sa part que la formation sera donnée à « 800 à 1000 ». Congolais, qui formeront un « nouveau » bataillon chargé de « servir de modèle » au reste de l’armée.La formation, d’un coût évalué à 6 millions de dollars, aura une durée de sept mois. Les militaires qui y participeront, venus de partout, ont fait l’objet d’une vérification de leurs antécédents « par nous et par le gouvernement congolais », « avec enquête dans leur village » d’origine, afin de ne pas inclure de criminels.
Quelque 80 Américains sont chargés de la formation 50 venus de l’armée et 30 d’une société de sécurité privée, MPRI (qui a eu des contrats en Bosnie, en Afghanistan, en Irak et dernièrement en Guinée équatoriale). « Beaucoup » d’entre eux parlent français, a précisé le général Sherlock, et il y aura en outre des traducteurs, « y compris pour traduire en swahili » - la lingua franca de l’est congolais, a ajouté M. Holmes.Selon M. Holmes, le gouvernement congolais s’est engagé à payer régulièrement ces soldats. Les Américains ont également obtenu l’assurance, disent-ils, que ce bataillon ne sera pas disperse, notamment pour étoffer la garde présidentielle, sa cohésion étant plus apte à lui permettre d’assurer le rôle de modèle qu’on attend de lui.

mardi 1 septembre 2009

Papa Gaspard Baseko, agent percepteur à l’office notarial, 62 096 francs congolais mensuels.

Récit tiré du "Thermomètre" de Sas Litete, un journal paraissant à Kisangani
Baseko Gaspard est percepteur à l’Office notarial, un de services générateurs des recettes de la ville de Kisangani. Son grade dans la fonction publique est celui d’AGB1, c’est-à-dire agent de bureau de première classe. Agé de 66 ans, il a une expérience professionnelle de plus de 45 ans dans les services publics. Il a été entre autres enseignant, directeur de prison, agent de la division provinciale de la justice… avant d’occuper depuis mi 2003 son nouveau poste de percepteur qui consiste à faire payer des taxes sur tous les actes légalisés par le notaire de la ville.
Il est marié, père de 7 enfants. Cinq de ces enfants, bien que majeurs, vivent encore sur le toit parental où l’on compte aussi une belle-sœur, 2 neveux, 3 nièces et 3 petits-fils. Petit calcul fait : Papa Gaspard, comme on l’appelle affectueusement, a au total 15 bouches à nourrir. « Déjà loger tout ce monde dans ma maison d’ONL (entendez office national de logement) de 4 petites chambres et un salon est un véritable casse-tête » me confie-t-il avant de préciser « Avec ma femme, j’occupe une chambre; les garçons en occupent une, et l’autre revient aux filles. Les moins jeunes se contentent du salon, la 4ème chambre nous servant de cuisine. »
Aujourd’hui, cet agent de l’Etat accepte de dévoiler ses revenus et sa façon de les gérer. « Mon salaire mensuel versé par L’Etat est de 22 096 Franc Congolais (environ 28 dollars américains). J’ai aussi une prime de l’entité territoriale décentralisée de 10 000 Franc Congolais (environ 13 dollars américains). Et, à chaque versement des recettes perçues par notre service pour le compte de l’entité ou du trésor public, nous avons une rétrocession de 20 %. En moyenne, cette rétrocession me rapporte environ 30 000 Franc Congolais (équivalent à 38 dollars américains). »
Après sommation, il en résulte que Papa Gaspard gagne mensuellement 80 dollars américains. Pas de loyer à payer, il occupe gratuitement dans une maison de fonction. Mais, quelles sont ses dépenses mensuelles ? 1. Repas familial : 10 000 Franc Congolais en moyenne par jour, soit 300 000 Franc Congolais (presque 385 dollars américains) le mois ; 2. Facture de consommation d’eau : 4 500 Franc Congolais (équivalent à 6 dollars américains) ; 3. Electricité (SNEL) : 5 300 Francs Congolais (presque 9 dollars américains). « C’est une tarification forfaitaire qui ne tient nullement compte des fameux délestages.
En effet, sur 7 jours de la semaine, rarement nous avons le courant trois jours ! » me rappelle-t-il ; 4. Imprévus : 25 000 Franc Congolais, soit 32 dollars américains. « En fait, ce que moi je considère comme imprévu ce sont les frais engagés pour les soins de santé, les cotisations lors des deuils chez des proches… » Ce ne sont là que les principales dépenses de ce fonctionnaire congolais. Il faut y ajouter la prime pour les enseignants des écoles que fréquentent les enfants, etc. Pas besoin d’être expert en comptabilité pour comprendre que Papa Gaspard dépense largement plus que ce qu’il gagne officiellement.
Quel est son secret ? « N’est-ce pas nos aïeux nous disaient qu’une chèvre attachée ne broute que l’herbe à sa portée ? » m’a-t-il rétorqué un peu énervé. J’ai eu comme l’impression d’avoir touché un point sensible, un point sur lequel mon interlocuteur ne veut pas du tout que l’on s’attarde. « Ma femme est dans les affaires. Depuis des années, elle vend des friperies au marché central. Elle contribue beaucoup à la survie de notre famille », m’a-t-il répondu pour sa défense.

mardi 21 juillet 2009

“Katanga Business” trébuche à Kisangani

Source : Collette Braeckman
Kisangani devait être la dernière étape de la présentation au Congo du film de Thierry Michel, Katanga Business, qui a déjà été projeté à Kinshasa, Bukavu, Lubumbashi, Likasi, au cours de séances qui, à chaque fois ont suscité enthousiasme, polémiques et débats passionnés.A Kisangani, les incidents n’ont pas manqué, d’abord techniques, puis, très clairement, beaucoup plus politiques : lors de la première séance de projection, qui se déroulait à l’université, le courant, soudain, a été coupé et la soirée dut être interrompue.
Le lendemain, la reprojection du film à l’université s’avéra impossible : les étudiants assura-t-on au cinéaste, étaient en examen, il ne fallait pas les déranger…A toutes fins utiles, Thierry Michel fut d’ailleurs convoqué à l’ANR, l’agence national de renseignements, où on lui demanda des explications à propos de ce film jugé très engagé, très politique.Le lendemain, le centre Wallonie Bruxelles, qui a une antenne à Kisangani, envisageait de projeter le film dans une salle du centre ville, dûment réservée et louée pour la circonstance mais cette séance, ouverte au grand public, n’eut pas lieu, elle non plus, ayant été tout simplement interdite.
La mesure, décidée par le gouverneur de la Province Orientale appuyé par les services de l’ANR a fait grand bruit au sein de la population et en particulier à l’Université, où étudiants et professeurs se sont demandé si leur pays n’était pas en train de revenir aux pratiques de la Deuxième République, ce temps où régnait la censure, où le seuls spectacles possibles étaient ceux qui avaient été autorisés par le « Guide » Mobutu et se consacraient à l’éloge de ses mérites…
Dans le cas de Katanga Business, Thierry Michel et ses amis se demandent toujours quelles sont les séquences de Katanga Business qui ont pu sembler litigieuses : la mise en cause du « lotto » minier qui sévit au Katanga, à l’heure où l’on vient d’apprendre que la presque totalité des terres de la province du cuivre avaient été cédées par le Cadastre minier à des investisseurs potentiels mais aussi à des aventuriers ou des spéculateurs, les images montrant comment sont réprimés des creuseurs qui manifestent afin de protester contre leur éviction des sites où ils trouvaient leur gagne pain, ou encore le portrait très (trop ? ) flatteur du gouverneur du Katanga Moïse Katumbi qui apparaît comme le personnage central d’un film.
Même si telle n’était pas l’intention de Thierry Michel, il est évident que Katanga Business contribue à faire connaître le très populiste gouverneur à travers tout le pays et que ses collègues des autres provinces prennent peut-être ombrage de la popularité croissante de celui qui apparaît comme leur rival du Katanga…Pour leur part, les étudiants de Kisangani, frustrés et déçus, ont donné à Thierry Michel une explication plus simple encore, assurant « tout se passe comme si on nous empêchait tout simplement de réfléchir, comme si on ne voulait pas que nous devenions intelligents… »